Elle est Poussey Washington, une petite chose toute douce en prison pour trafic de drogue qui se demande comment elle est encore en vie.

Samira Wiley et Danielle Brooks

Samira Wiley et Danielle Brooks

Que pouvez-vous nous dire de cette saison 3 ?

Samira Wiley : A la fin de la saison 2, Poussey rejoint les filles après son isolement. L’énergie qui existait dès la saison 1 entre Poussey et Taystee m’a manquée. Dans la saison 3, Poussey essaye de retrouver le rythme, sa place et une certaine normalité dans cet univers carcéral. Mais elle est toujours brisée par ce qu’il lui est arrivé dans la saison 2.

Son passage à tabac dans la salle de bain ?

Notamment. Cette scène a été très difficile à tourner pour l’émotion brute que cela m’a demandée.

Quelles autres scènes ont été difficiles pour vous ?

Quand j’ai dû jouer Poussey ivre. Je ne voulais pas paraître comique ni caricaturale. J’ai demandé à tous ceux que je connaissais qui avaient déjà joué des gens saouls à l’écran. Et les scènes de sexe aussi sont difficiles pour moi. Je n’en avais jamais tournées auparavant. Je n’étais pas timide mais nerveuse. Mais tout le monde sur le plateau m’a mise à l’aise. Quand les gens sont professionnels, vous vous sentez en sécurité.

Orange is the new black, Scandal, How to get away with murder… Il y a de plus en plus de rôles forts pour les actrices afro-américaines aujourd’hui.

C’est en effet un bon moment pour être une actrice et surtout une actrice de couleur. Certaines actrices avant moi ont dû lutter contre une telle opposition et abattre de nombreuses barrières. J’ai de la chance et je me sens presque coupable de ne pas avoir à me battre autant qu’elles. Je me sens bénie d’avoir la position que j’ai aujourd’hui.

Quelles recherches avez-vous faites pour créer Poussey ?

J’ai lu le livre de Piper Kerman [dont la série est adaptée] . La série est aussi liée à une association pour aider les femmes en prison et travaille sur un programme de réinsertion. Mais j’essaye de ne pas encombrer mon esprit avec trop d’informations techniques qui m’écarteraient de l’humanité du personnage. Les réponses dont j’ai besoin sont dans les scénarios.

Comment vivez-vous le fait de travailler avec un cast presque exclusivement féminin ?

C’est un environnement fait de soutien et d’entraide. Mais je viens du théâtre où il y a beaucoup de rôles féminins sur chaque projet, j’y suis donc habituée. Il semblerait pourtant que ce soit rare en télé. Natasha Lyonne [elle joue Nicky Nichols] qui est dans le métier depuis qu’elle a 6 ans m’a dit qu’elle n’avait encore jamais connu ça. Je suis un peu naïve et je pensais que c’était partout pareil. (Sourire)

D’où vient le succès de la série selon vous ?

En partie parce que ces femmes sont réelles. Rien n’est édulcoré. La série montre aussi que le fossé entre les gens en prison et nous est plus petit qu’on ne le pense. Les téléspectateurs voient un peu d’eux-mêmes dans ces personnages ou ils y voient une fille ou un ami. Ce n’est pas une prison de sécurité maximum, les prisonniers n’y sont pas pour des crimes haineux mais pour avoir déraillé et fait une erreur. Cela peut arriver à tout le monde.

Comment voyez-vous la fin de Poussey ?

Pas avant de nombreuses saisons en tout cas (rires). Je la vois dehors. Episode après épisode, vous voyez tant de potentiel dans ces femmes, leur intelligence, l’attention qu’elle porte aux autres. Vous avez à la fois de la compassion et de l’empathie pour elles. Que Poussey soit en prison prive le monde d’une jeune fille brillante qui pourrait accomplir tant de choses si elle était dehors. Pour moi, dans l’épisode final de la série, tout le monde devrait retrouver sa liberté (rires).

Pourriez-vous survivre en prison ?

J’en ai des frissons rien que d’y penser. Je suis si petite. J’essaierais de jouer les dures mais je finirais tabassée, j’en suis sûre.

Prenez-vous le temps entre deux saisons de faire autre chose ?

J’aimerais pouvoir faire plus de films mais je vous avoue que mon cœur appartient au théâtre. J’avais l’habitude de faire quatre pièces par an et ne pas être montée sur les planches ces trois ou quatre dernières années a créé un vide.

Qu’aimez-vous dans le théâtre que vous ne trouvez pas dans la télé ?

En film et en théâtre, vous avez une histoire, un arc entier que vous faites vivre à votre personnage pendant 1h30 à 2h00. Vous savez tout ce qui va arriver, vous avez toutes les informations. En télé, vous ne savez même pas ce qui va arriver dans le prochain épisode tant que vous n’avez pas lu le scénario. Vous devez avoir une grande confiance dans les auteurs et dans l’histoire où qu’elle aille. Je dois alors abandonner certains espoirs que j’ai pour le personnage. Au théâtre, je connais mon personnage par cœur. En télé, je ne peux pas sans m’y perdre. Mais cela reste surprenant et amusant.

Qu’ont pensé vos amis de théâtre quand vous leur avez dit que vous acceptiez un rôle de télé ?

Tous mes amis sont acteurs. Il n’y a que 5% d’acteurs qui travaillent. Ils étaient donc tous contents pour moi d’avoir trouvé du travail ! Et puis, les acteurs que je connais naviguent d’un médium à un autre sans distinction. Quel que soit le medium, je cherche à faire du bon travail et à créer des émotions chez les gens.

Table ronde réalisée sur le tournage de la série, à New York, le 20 octobre 2014

Crédit photo : JoJo Whilden pour Netflix

Saison 3 actuellement sur Netflix