Elle est Suzanne « Crazy Eyes » Warren, celle qui tape d’abord et pose les questions ensuite.

Uzo Aduba et la créatrice des costumes Jennifer Rogien

Uzo Aduba et la créatrice des costumes Jennifer Rogien

Pourquoi selon vous le public trouve-t-il Crazy Eyes aussi adorable ?

Uzo Aduba : (Elle éclate de rire) Je ne sais pas mais j’adore ça ! Elle ne peut pas s’empêcher d’aller vers les autres mais elle est incontrôlable. Elle reste consciente de ses choix, même si c’est après les faits, et de ce qui se passe autour d’elle, du pourquoi et du comment. Elle n’abandonne pas non plus même quand elle a été blessée dans son cœur. Habituellement, quand vous avez été repoussé, vous vous fermez à l’amour pour que cela ne vous arrive plus. Elle, elle y croit à cet amour. Elle a la foi. Elle est aussi la personne la plus honnête de la série. Elle n’a pas de filtre, elle ne sait pas dire un mensonge. Elle souffre même d’essayer de mentir. Mentir devrait pourtant être votre quotidien en prison.

Devez-vous aimer votre personnage pour l’interpréter ?

Ce n’est pas une question d’aimer ou non. Vous devez comprendre et ressentir de l’empathie pour votre personnage. Si je ne comprends pas les raisons qui font qu’elle fait ce qu’elle fait, je ne fais que commenter ses raisons. Il y a alors jugement de ma part et je prends position. Aucun méchant ne se pense méchant. Il a ses raisons qu’il estime justes pour lui. Je parle des gens qui ne tuent pas des êtres humains parce qu’il n’existe pas de raison qui justifie de tuer quelqu’un. Mais pour entrer dans l’esprit et la psychologie de Crazy Eyes, je dois avoir de l’empathie pour elle. Dans son cas, je l’aime aussi profondément. Plus que de l’amour, j’ai envie de la protéger car je me sens mise à nue par moments et je ne veux pas qu’elle soit surexposée.

Malgré ses excentricités, elle n’est jamais ridicule. Elle est toujours réaliste et crédible.

Il y a une réplique dans la saison 1 au sujet de Crazy Eyes : « Elle est innocente comme un enfant sauf que les enfants ne font pas peur. » J’ai aussitôt vu une femme adulte avec un gros marteau dans une main et une tétine dans l’autre (rires). Mais quand j’imagine la prison, un enfant n’est pas ce qui me vient à l’esprit en premier. La décrire de cette façon signifie qu’elle agit avant de réfléchir. Et c’est la clé de qui est cette femme. Il n’y a aucun calcul derrière ses actions, ce qu’elle fait est pur.

Sentez-vous un avant et un après Crazy Eyes dans votre vie ?

Avant, les gens ne me demandaient même pas leur chemin. Maintenant, ils me disent : « Mais vous semblez si… normale ? » tout en cherchant un autre mot pour éviter de dire folle (rires). Je suis reconnaissante que les gens regardent la série et l’aiment. C’est alors encore plus cool d’en faire partie.

Cette série ne semble avoir peur de rien.

Et vous pouvez emmener le téléspectateur n’importe où tant que vous le faites avec intelligence. Mais cela reste une comédie. Jenji [Kohan, la showrunneuse] apporte de la lumière et de la légèreté dans un lieu qui n’est pas censé en avoir. Elle nous faire entrer dans ce monde carcéral par le rire et l’humour pour mieux nous faire réfléchir et nous inciter à en parler.

Table ronde réalisée sur le tournage de la série, à New York, le 20 octobre 2014

Crédit photo : JoJo Whilden pour Netflix

Saison 3 actuellement sur Netflix