Le sauvetage – ou non – d’un homme coincé dans sa voiture ensevelie dans un tunnel effondré. Le réalisateur Kim Seong-hun revient sur deux scènes qui l’ont touché. Tunnel sort en salles ce 3 mai.

Scène 1 :

Ha Jung-woo

Kim Seong-hun : Revoir cette image me plombe tout à coup car nous tournions déjà depuis longtemps et tout le monde était fatigué. Voyez le visage de l’acteur Ha Jung-woo, il a un regard de chien battu tant il est exténué. Autour de lui, vous devinez par les petits détails le caractère de son personnage : il a aménagé sa voiture avec des pages de catalogue et des bouts de tissus, mis du Scotch aux endroits où il pouvait se blesser… Il a fait de sa voiture une maison cocon. Il ne se laisse pas aller, il a l’espoir de s’en sortir. Pour accentuer le côté réaliste des scènes dans le tunnel et créer un effet de claustrophobie, j’ai mis quatre mini caméras dans le véhicule, j’ai très travaillé le son et je n’ai utilisé que les sources lumineuses que le personnage a à sa disposition. Mais cette scène est la seule dans le tunnel où il y a autant de lumière car c’est le jour de son sauvetage et pour être vu des secouristes, il a tout allumé : ses lampes torches et son portable, le plafonnier et les phares de sa voiture. C’est aussi à partir cette scène-là – et de l’échec de cette tentative de sauvetage – qu’il va déprimer et qu’à l’extérieur, les autres vont s’interroger sur la valeur de sa vie. Ce thème est important pour moi. Dans la vie, les enjeux économiques et politiques passent souvent avant une vie humaine alors qu’elle est primordiale.

Scène 2 :

Doona Bae

Kim Seong-hun : Encore maintenant, j’adore l’expression sur le visage de Doona Bae. Elle sait que la tentative de sauvetage a raté mais elle est toute en retenue, elle ne veut pas montrer ses émotions devant tout le monde, il n’y a ni larme ni mélodrame. Doona Bae incarne cela parfaitement. Ce jour-là, j’ai eu beaucoup de chance et l’aide du ciel. Pour cette séquence, je voulais de la neige comme symbole de la résurrection car c’est le jour du sauvetage. Puis, c’est l’échec et la neige qui s’accumule sur le sol symbolise alors un poids supplémentaire sur l’effondrement. Mais quand nous sommes arrivés sur le décor, les techniciens m’ont dit qu’il était impossible d’y mettre de la neige artificielle. J’allais abandonner l’idée mais il a neigé la nuit précédant le tournage et pendant toute la journée. Sans elle, la scène aurait eu moins de force. Derrière Doona Bae, vous voyez les journalistes. Ils sont comme des hyènes qui attendent la mort de leur proie pour en faire leur histoire. Mon film est aussi une satire sociale et politique. Je m’y moque du gouvernement parce que dans la réalité, il ne fait pas grand-chose pour être applaudi. Des politiques m’en ont parlé. Je leur ai dit que nous voyons tellement de choses bien dans la vie réelle que je voulais montrer quelque chose de faux dans mon film. Je ne pense pas les avoir convaincus.

Article paru dans Studio Ciné Live – N°88 – Avril 2017

Crédit photos : © Another Sunday / BA Entertainment / History E&M

 

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