Alors que Transformers 2 : La revanche s’apprête à déferler sur le monde, Scott Farrar, superviseur des effets visuels chez Industrial Light and Magic, revient sur la création des Autobots et autres Decepticons dont il a la responsabilité depuis le premier épisode.

Devastator

Quelles sont les premières étapes de la création d’un Transformer?

Scott Farrar : Nous commençons avec des dessins qui viennent du département artistique. Mais ces dessins ne représentent le robot que de face et de dos. Pour l’avoir de côté, il faut lui donner du volume et donc lui donner sa forme tridimensionnelle finale, dans l’ordinateur. Mais une fois que le robot est en 3D, tout peut encore changer. Pour créer Devastator, par exemple, nous avons pris de gros engins de construction et nous avons joué un peu avec. Nous avons ainsi changé les roues parce que nous ne les trouvions pas assez cool. Mais nous utilisons les vrais engins comme base de travail : nous photographions leurs vraies pièces détachées. Sur le premier Transformers, nous avions 6 000 photos de pièces détachées et pièces de moteur. Nous avions des photos de pistons, de freins à disque, d’embrayages… Les dessinateurs s’inspirent de ces photos pour que le résultat final ait l’air réel.

Scott Farrar

Combien de temps prend cette création ?

Dans les six mois, et ce quel que soit son temps d’apparition à l’écran. Vous devez créer toutes les pièces sans exception. C’est comme aller dans un atelier de fabrication de pièces détachées, sauf que c’est un atelier virtuel. La construction du robot prend douze à seize semaines, en fonction du personnage. Puis vous travaillez sur les textures, sur la peinture. Certaines de ses pièces ont de quatre à seize couches d’informations dans l’ordinateur pour que leur texture ressemble, par exemple, à du plastique ou à du verre ou à un chrome rutilant ou à de l’acier rouillé. Seize couches pour une pièce, c’est beaucoup. Vous avez aussi les animateurs qui relient toutes les pièces entre elles et ceci peut prendre encore plus de temps car il faut que le squelette du robot se tienne. Puis vous pouvez commencer à envisager à incruster le robot dans le plan et vous continuez à travailler dessus encore et encore. Pendant le tournage, j’ai entre 80 et 100 personnes qui travaillent sur les robots. En fin de postproduction, j’ai jusqu’à 300 personnes.

Comment faites-vous pour que vos Transformers soient si bien intégrés dans les scènes du film ?

La base des effets spéciaux d’aujourd’hui est la cartographie. Si vous voulez qu’un personnage, ou quelle que soit la chose que vous créez en images de synthèse, marche sur le sol ou grimpe des marches ou se déplace sur une surface, vous devez soigneusement mesurer tout l’environnement réel dans lequel il sera incrusté car cet environnement va être recréé dans l’ordinateur. Si les mesures sont mal prises, le pied ne touchera pas le sol et il flottera dans l’air.

Si vous prenez les blocs de pierre d’une pyramide, par exemple, elles sont inégales, elles sont de différentes dimensions, elles sont usées par le temps et les éléments. Vous les photographiez donc sous différents angles puis vous utilisez des logiciels de calculs qui vous permettent d’en connaître les mesures, de savoir que cette pierre-ci est plus haute, que celle-là est plus basse… Et vous recréez une copie de la pyramide dans l’ordinateur. Le personnage une fois incrusté, vous avez vraiment l’impression qu’il est sur la pyramide. C’est assez sophistiqué et cela permet de réaliser des plans qui ont l’air vrais. Mais vous trichez aussi parfois en modifiant quelques blocs de pierre…

Cela demande-t-il une préparation drastique sur le tournage ?

En fait, sur le tournage, vous devez être prêt à tout car vous avez seulement une idée générale du plan final. Pour les scènes concernant les pyramides, nous savions que nous avions des vues d’hélicoptère, des vues en plongée, des vues en contre-plongée mais nous ne savions pas quels plans seraient utilisés dans le montage final. Nous ne pouvions donc pas travailler en avance sur un plan, surtout avec Michael Bay. Si nous travaillons sur un plan qui ne sera finalement pas dans le film, c’est de l’argent perdu. Et c’est beaucoup d’argent.

Sur le plateau, comment représentez-vous la position d’un Autobot pour la caméra et les acteurs, sachant qu’il ne sera ajouté que bien plus tard dans le plan ?

Megan Fox, Shia LaBeouf et Optimus Prime

Nous utilisons un outil très sophistiqué : une perche télescopique d’un laveur de vitres. (Rires) Je crois en la basse technologie pour des effets de haute technologie. Au début, nous mettions un visage d’Autobot grandeur nature en carton au sommet de la perche mais elle devenait vite trop lourde pour le technicien qui la tenait. Nous nous contentons désormais de la perche et l’acteur en regarde le bout. Cela lui donne son repère. Mais quand vous regardez un visage, vous ne regardez pas qu’à un seul endroit, vos yeux se promènent sur le visage. Nous travaillons donc aussi cela avec l’acteur. Shia LaBeouf est devenu très bon à cet exercice. Il n’y a pas que la qualité des effets spéciaux qui importe, c’est aussi l’acteur qui donne la crédibilité à une scène.

Crédit photos : © Paramount Pictures