Le jeune élève sorcier est de retour pour le deuxième opus de ses aventures. Harry Potter a grandi, il n’est pas content et il va encore moins se laisser marcher sur la robe. Nouveaux défis quidditchiens à relever, nouveaux professeurs excentriques à côtoyer, nouvelles bestioles repoussantes à affronter, sa baguette magique ne va pas chômer dans cette chambre des secrets. A vos balais !

Daniel Radcliffe (Harry Potter)

Trois jours après la sortie de Harry Potter à l’école des sorciers, le tournage de La chambre des secrets débutait à une heure de Londres, aux studios de Leavesden. « Aucun de nous n’a eu la possibilité de se reposer sur ses lauriers et de penser au succès du premier épisode, reconnaît le réalisateur Chris Columbus. Ce qui était une bonne chose, notamment pour les enfants. A ce stade, les équipes artistique et technique constituaient une grande famille et s’il était important de partager ce grand moment, il était tout aussi essentiel de ne pas perdre cette dynamique dont nous avions besoin pour commencer La chambre des secrets. »

Rupert Grint (Ron), le réalisateur Chris Columbus et Daniel Radcliffe (Harry)

Seconde aventure de l’apprenti sorcier, La chambre des secrets a été publié en 1998 et s’est déjà vendue à plus de 42 millions d’exemplaires dans le monde. « C’est pourtant la moins aimée de la série car l’intrigue est plus linéaire par rapport aux trois autres, précise Chris Columbus. Mais c’est la plus cinématographique des quatre histoires. Elle propose des scènes d’action ahurissantes et des décors impressionnants. J’ai donc voulu un résultat à l’écran plus énergique. Je multiplie les mouvements de caméras, j’utilise le Steadicam… L’histoire étant plus excitante, je voulais un film plus excitant. J’ai dû changer mon style. »

Action, réaction

Harry Potter à l’école des sorciers présentait le monde du jeune héros, La chambre des secrets nous plonge directement dans l’aventure. L’apprenti sorcier entre en deuxième année à Poudlard et se retrouve confronté à des phénomènes inexpliqués qui pourraient mener à la fermeture de l’école. Soupçonné d’être à l’origine de ces incidents maléfiques, il est mis à l’écart et ne pourra compter que sur son courage et ses amis Ron et Hermione. « La chambre des secrets est plus sombre, plus effrayant mais aussi plus drôle, souligne Chris Columbus. Dans la première histoire, Harry était plutôt passif comparé aux personnages hauts en couleurs qui l’entouraient, il ne trouvait réellement sa voie que dans le dernier tiers du film. Dans La chambre des secrets, il fait preuve de plus de confiance et de force dès le début. » « Mon personnage est plus réactif, confirme Daniel Radcliffe. Poudlard est tout autant son école que le foyer accueillant qu’il n’a jamais connu. Quand il y retourne au début de La chambre des secrets, il réalise que ce foyer est en danger et il est déterminé à le protéger. »

Daniel Radcliffe (Harry, Rupert Grint (Ron) et Emma Watson (Hermione)

Tous s’accordent à dire que les personnages de cette aventure ont gagné en maturité. Les jeunes acteurs ont suivi le mouvement. « Les enfants sont plus confiants et capables de puiser dans leurs nouvelles expériences afin d’enrichir leur personnage, confie le producteur David Heyman. Mais en même temps, ils ont su garder leur enthousiasme, leur jeunesse et cette faculté d’être toujours émerveillés. » Le succès de l’aventure Harry Potter a pourtant changé leur vie. « Maintenant, j’ai ma tête sur les culs de bus, plaisante Daniel Radcliffe. On me reconnaît dans la rue, ce qui est plutôt génial vu que j’aime me faire remarquer… » « Je ne me suis pas encore habitué à tant d’attention, observe de son côté Rupert Grint, mais c’est quand même cool. On me demande parfois de signer des trucs bizarres. La dernière fois, c’était un chéquier. Et il y a cette question que l’on me pose tout le temps :’ Tu as rencontré Daniel Radcliffe ?’ »

Quelques petits nouveaux

Le Daniel Radcliffe en question a quelque peu changé physiquement depuis le premier film : plus grand, plus mince, avec un visage plus adolescent, ce qui inquiète la production pour la suite des épisodes. « Si je continue à grandir, avoue le jeune acteur, je ne correspondrai plus au personnage, je paraîtrai trop vieux. Mais pour l’instant, je ne m’en inquiète pas trop. Depuis L’école des sorciers, j’ai gagné huit centimètres et ma voix a mué, mais personne ne semble l’avoir remarqué. » Peut-être parce que la production a surtout remarqué une nette amélioration dans le jeu de ces acteurs débutants. « Franchement, ils sont meilleurs que dans le premier film, lance Chris Columbus, mais il faut dire qu’ils viennent d’accumuler environ 300 jours de tournage sur les deux films. Ils ont eu le temps de se perfectionner. »

Jason Isaacs (Lucius Malefoy)

Ils ont également eu le temps de se frotter au talent des acteurs confirmés du premier film (Maggie Smith, Richard Harris, Alan Rickman) et des nouveaux du second, dont Kenneth Brannagh et Jason Isaacs. Toujours des Britanniques, pour répondre aux exigences de J.K Rowling. « Le choix de Kenneth Brannagh pour le rôle de Lockhart était une évidence pour moi, reconnaît Chris Columbus. Il est vrai que l’on a aussi contacté Hugh Grant, mais je cherchais des acteurs qui puissent disparaître dans leur rôle. Avec Hugh, j’aurais eu l’impression d’un cameo. Kenneth m’a prouvé dans le passé qu’il pouvait se perdre dans un rôle, se fondre dans un monde. Quant à Jason Isaacs, sa performance dans Le patriote m’avait donné la chair de poule. Il était parfait pour personnifier le mal et ce côté sombre et sous-jacent de la maison Serpentard. » « Dans la toute première scène que j’ai tournée, raconte Jason Isaacs, je suis humilié par Dumbledore et je quitte la pièce. Je devais claquer la porte. J’ai demandé à Chris : ‘Et si je levais ma canne et fermais la porte par magie ?’ Il a dit : ‘Oui !’ J’ai su alors que j’allais vraiment m’amuser sur ce film. »

1 000 effets spéciaux visuels

Et il n’a pas été le seul à s’amuser. Daniel Radcliffe est célèbre pour ses blagues à l’encontre de sa cible favorite : Robbie Coltrane alias Hagrid. Il a reprogrammé son téléphone portable en turc, il lui a collé des écriteaux “ Frappe-moi ” dans le dos… Il s’est aussi couvert le visage de faux sang pour faire croire qu’il était blessé, semant ainsi la panique dans l’équipe… « Il a aussi dansé la macarena et le French cancan sur une table, toujours avec Robbie, sourit Emma Watson. « Cela faisait une semaine que nous tournions dans la Grande salle avec 300 figurants, il faisait très chaud, la nourriture puait et nous nous ennuyions à mourir entre les prises. Nous avions épuisé les potins et nous en avions assez de se passer des petits mots sous les tables. Alors leurs danses ont vraiment illuminé notre journée. »

Rupert Grint (Ron) et Daniel Radcliffe (Harry)

Grand soleil également dans le cœur de Ruper Grint, fier d’avoir conduit une voiture. « Une voiture volante !, corrige-t-il, un sourire enfantin sur le visage. Et on allait super vite ! C’est ma scène préférée, celle-là et la scène où je vomis des limaces. Je devais mettre ces limaces couvertes d’un truc visqueux dans ma bouche et ensuite les recracher. Je crois qu’elles étaient en plastique… J’espère qu’elles étaient en plastiques. Mais elles n’avaient pas si mauvais goût. » La scène des araignées n’était en revanche pas du tout à son goût. Arachnophobe, il n’a eu aucun mal a joué la peur face à Aragog, l’araignée géante.

« Aragog s’est avérée être un véritable challenge pour le département des créatures, explique Nick Dudman, responsable du maquillage effets spéciaux et des créatures. Elle devait marcher, parler, avoir un corps de près de trois mètres et des pattes de plus de cinq mètres de long. Chaque patte est manipulée par un technicien différent. Nous avons mélangé les mécanismes hydrauliques, les mécanismes à air pneumatique et l’informatique. Le tout pèse près d’une tonne. » A l’opposé, Dobby, autre créature du pays de Harry Potter, est léger comme une plume car numérique des pieds aux oreilles. « Dobby est un personnage clé du film, rappelle Chris Columbus, et depuis le début je ne voulais pas d’une marionnette afin de pouvoir le diriger comme un véritable acteur. Ce n’était possible qu’avec les images de synthèse. Ces effets spéciaux visuels sont vraiment libérateurs pour un réalisateur. Sur L’école des sorciers j’apprenais encore car je n’avais jamais tourné un film avec 900 effets spéciaux visuels. Sur La chambre des secrets, je n’étais pas le moindre intimidé et pourtant, nous sommes à près de 1 000 effets spéciaux visuels. »

Une illusion parfaite

La chambre des secrets

Comme sur le premier film, la production n’a d’ailleurs pas vraiment regardé à la dépense, que ce soit pour ces effets spéciaux visuels ou pour les décors. Vingt nouveaux lieux ont ainsi été créés dont la chambre des secrets, de loin le décor le plus important du film : plus de 76 m de long sur près de 37 m de large (la Grande salle ne fait “ que ” 43 m sur 12 m). « Dans le livre, la chambre est une caverne immense, tout en hauteur, mais le plus grand plateau ne faisait que 8 à 9 m de haut, avoue Stuart Craig, le chef décorateur. Nous aurions pu ajouter de la hauteur avec le numérique, mais nous avons préféré créer l’illusion de la profondeur. Résultat, la chambre semble haute de plusieurs dizaine de mètres avec sa base submergée. En réalité, l’eau qui entoure la base n’est profonde que de 30 centimètres mais de couleur noire pour accentuer la profondeur. » L’illusion est parfaite.

Une illusion aussi présente dedans que dehors. A part les façades des maisons de Privet Drive, les bouts du saule cogneur en latex qui traînent près de la piste d’atterrissage désaffectée, rien ne transparaît du tournage du film. Les décors ont été construits dans les hangars de cette ancienne base aérienne qui sert aujourd’hui de studio pour les films de Harry Potter et qui est loin de tout. « Celui qui nous chercherait aurait dû mal à nous trouver, sourit Chris Columbus. C’est peut-être pour cela qu’il n’y a ni fans détraqués, ni photographes indiscrets à l’entrée des studios. Nous tournons la suite d’un blockbuster et il n’y a personne pour nous embêter. C’est quand même bizarre, non ? » Jamais content.

Article paru dans Ciné Live – N°63 – Décembre 2002

Crédit photos : Warner Bros