Treize ans après Avatar, James Cameron repousse à nouveau les limites de l’imagination et donne une suite au plus gros succès du box-office mondial (2,8 milliards de dollars). Dans Avatar : La voie de l’eau, l’action se déroule toujours sur Pandora mais se déplace sur les vastes océans de l’exolune, au sein du clan de l’eau et peuple des récifs Metkayina. Créer cet univers aquatique inédit a demandé une prouesse technique et artistique dont voici les secrets. Avatar : La voie de l’eau sort en salles ce 14 décembre.
Une Pandora aquatique
Plutôt que de créer une multitude de nouvelles planètes, James Cameron a préféré poursuivre son exploration de Pandora. L’exolune tourne autour d’une planète géante gazeuse appelée Polyphème dans le système stellaire Alpha Centauri-A. Comme la Terre, elle offre tout une gamme de paysages. C’était donc parfait pour inventer de nouveaux biomes et de nouvelles cultures. Compte tenu de son amour pour les océans, le réalisateur a choisi l’eau comme terrain d’exploration.
Dans Avatar : La voie de l’eau, Jake Sully (Sam Worthington) et sa femme Neytiri (Zoe Saldaña), leurs enfants Neteyam (James Flatters), Lo’ak (Britain Dalton), Tuk (Trinity Jo-li Bliss) et leur fille adoptive Kiri (Sigourney Weaver) s’exilent afin d’échapper à nouveau au peuple du ciel. La RDA (Administration pour le développement des ressources) revient coloniser Pandora afin d’en faire une planète de secours pour l’humanité car la Terre sera bientôt inhabitable. Les Sully rejoignent le clan Metkayina qui vit en harmonie avec les océans.
James Cameron s’est tourné vers les chefs décorateurs Dylan Cole et Ben Procter pour notamment concevoir l’aspect physique du monde aquatique de Pandora, ses Na’vi, sa faune et sa flore. Une prouesse technique permise grâce au développement de nouveaux procédés et technologies.
Les Na’vi de l’eau
Les Metkayina sont d’une nuance de bleu légèrement différente de celle des Omatikaya, tournant plus vers le vert. Ce peuple des récifs, s’est adapté à la vie dans l’océan, ce qui lui confère une autre physiologie. Ils possèdent de grandes mains, une poitrine et une cage thoracique plus développées. Ils sont également dotés d’épaisses protubérances de cartilage sous la peau, presque comme des nageoires. Ces dernières ont poussé de chaque côté de leurs bras et de leurs jambes, et les aident à se mouvoir dans l’élément liquide. Enfin, ils ont une queue plus large afin de propulser leur corps dans l’eau. Les Metkayina se font tatouer le corps pour la première fois à l’adolescence.
Ils ont bâti leur village sur les récifs. Tout comme les Omatikaya avaient leurs lieux sacrés dans la forêt tropicale, les Metkayina ont la crique des Ancêtres, où s’élève leur arbre spirituel. Ce dernier est sous-marin et exotique, et rappelle l’Arbre des âmes. Il est couvert de filaments magenta lumineux et de frondes ressemblant à des algues.
Les costumes des Metkayina
Les costumes richement détaillés du peuple des récifs, conçus par Deborah L. Scott, renforcent le sentiment d’immersion. Ils expriment une culture unique et s’inspirent des ressources de leur environnement. Wētā FX – la société néozélandaise de Peter Jackson qui avait aidé James Cameron à donner vie aux Na’vis et aux avatars du premier film – a réalisé la grande majorité des costumes Na’vi numériquement. Cependant, le studio a réellement fabriqué de nombreuses tenues et une grande partie des bijoux. “Nous avons fabriqué entièrement les vêtements parce qu’il est impossible d’en comprendre le mouvement sans avoir la pièce entière,” souligne la chef costumière. “Un vêtement lourd, léger, fibreux, façonné avec des plumes ou des franges ne bouge pas de la même manière dans l’air, face à la brise ou sous l’eau. D’où la nécessité pour nous d’en avoir un exemplaire afin de voir la façon dont il se comporte.”
Les costumes d’Avatar : La voie de l’eau sont beaucoup plus complexes que ceux du premier long métrage. “Ils paraissent réels parce qu’ils obéissent aux lois de la physique,” affirme le superviseur des effets visuels Joe Letteri. “Si quelqu’un marche et bouge ses bras, le tissu ploie, se froisse, se plisse. Si le costume est composé d’une multitude de petites pièces telles des perles, des ficelles, des plumes voire des morceaux de tissu, tout cela doit être soumis à une simulation physique très détaillée pour qu’il se comporte comme s’il s’agissait d’un véritable morceau de tissu.”
La faune des océans
Les Metkayina entretiennent une relation unique et spirituelle avec les tulkuns. Ces créatures sensibles ressemblent à des baleines et peuvent mesurer près de 90 mètres de long. Les Metkayina dessinent des tatouages qui racontent l’histoire de leur famille sur le corps et les nageoires des tulkuns, après leur cérémonie de passage à l’âge adulte. Metkayina et tukluns communiquent ensemble grâce à un langage des signes – développé spécialement pour le film par l’acteur et défenseur des sourds CJ Jones.
Parmi les autres créatures aquatiques, l’ilu représente une espèce de mammifère fringant et joueur. James Cameron le décrit comme “un croisement entre une raie manta profilée telle un biplan, à laquelle auraient été adjoints le long cou d’un plésiosaure et les ailes d’un avion de chasse européen”. Pour Dylan Cole, ces créatures aquatiques volantes renvoient à l’ikran, cette espèce de prédateur aérien ressemblant à un dragon mis en vedette dans Avatar.
Le skimwing est quant à lui un amphibien. Il possède une structure branchiale mais peut également respirer à la surface de l’eau. C’est une monture de guerrier. Il peut être agressif, dangereux et rapide. Il s’inspire en partie du poisson volant, mais avec une forme de tête très différente et des ailes brillantes, colorées sur un motif basique de noir et d’orange avec un peu de blanc.
La performance capture sous-marine
Pour Avatar : La voie de l’eau, James Cameron et son équipe ont réfléchi à la façon de capter les performances sous l’eau. Cela n’avait jamais été fait auparavant. “La clé était de filmer sous l’eau et à la surface pour que les acteurs nagent, émergent et plongent correctement,” explique le réalisateur. “Cela a l’air réel parce que le mouvement est réel. L’émotion n’en est que plus renforcée.” La performance capture a débuté en septembre 2017. Elle a duré environ 18 mois. Le réalisateur a travaillé avec les comédiens sur les scènes des quatre suites.
Le réservoir d’Avatar : La voie de l’eau
L’équipe logistique a construit un énorme réservoir dans les studios de Manhattan Beach, en Californie, où se trouve Lightstorm, la société de production de James Cameron et Jon Landau. Mesurant 36 mètres de longueur, 18 de large et 9 de profondeur, il pouvait contenir près de 100 mètres cubes d’eau, suffisamment pour reproduire les conditions océaniques réelles.
Cette cuve a servi de “volume” – terme désignant le plateau de performance capture – pour les scènes sous-marines. “Nous pouvions faire des vagues venant se briser sur le rivage et avoir des comédiens tentant de sortir de l’eau alors qu’ils sont heurtés par les vagues,” raconte James Cameron. “Nous pouvions créer l’interaction du ressac avec les créatures et les gens qui remontent à la surface, prennent une vague de plein fouet et essaient de déclamer leur texte… tout en essayant de respirer en même temps.” Un système surnommé “le champ de course”, composé de deux hélices de bateau de près de deux mètres de diamètre, a été utilisé pour entraîner le courant dans le réservoir. Le courant ne dépassait pas 10 nœuds (18,5 km/h) mais il donnait l’illusion qu’il était beaucoup plus rapide.
Des acteurs et des techniciens en apnée
Pour que la performance capture fonctionne sous l’eau, elle devait être limpide. James Cameron avait initialement pensé que l’équipe chargée de filmer les acteurs pourrait porter un équipement de plongée sous-marine pendant le tournage dans la cuve. Il n’avait cependant pas prévu que leur appareil respiratoire créerait des perturbations dans l’eau. “On ne peut pas avoir trop de bulles d’air car chacune d’elles agit comme un petit miroir réfléchissant,” remarque le réalisateur. “Le système essaie de lire tous les points de marquage sur le corps de l’acteur pour pouvoir capter son mouvement. Cela devient compliqué car il n’arrive pas à faire la différence entre un point de marquage et une bulle.”
La seule option était que tous ceux qui travaillaient dans le réservoir retiennent leur souffle. Si un technicien en bas s’occupait des éclairages, il devait retenir sa respiration. Pareil pour les opérateurs caméra. Et bien sûr, pour les acteurs. Pour les aider à offrir des performances convaincantes sous l’eau, les comédiens se sont exercés à la plongée libre avec l’expert de renommée internationale Kirk Krack. Tous les membres de l’équipe se sont montrés doués pour la plongée libre. Kate Winslet, qui joue Ronal, la Tsahik du clan Metkayina, a, quant à elle, excellé dans cette épreuve. “Kate a réellement apprécié l’exercice,” souligne James Cameron. “Elle a été capable de rester en apnée statique pendant environ 7 minutes et 20 secondes. Je fais de la plongée en apnée depuis 50 ans. Je n’ai jamais pu retenir mon souffle au-delà de 5 minutes et demie.”
Deux volumes et une caméra virtuelle
“Nous nous sommes retrouvés avec deux volumes distincts, pour l’eau et pour l’air,” révèle James Cameron. “Ils devaient être placés l’un au-dessus de l’autre avec un espace d’à peine un centimètre entre eux. L’ordinateur prend les données d’un volume, puis de l’autre et, en temps réel, intègre toutes ces informations pour me montrer sur la caméra virtuelle des gens qui vont et viennent, nagent, montent sur un ponton ou plongent et évoluent sous l’eau. Il s’agissait de fusionner deux méthodes de capture complètement distinctes. Évidemment, il a fallu beaucoup de temps pour mettre au point le logiciel nécessaire, mais le résultat final est étonnant.”
James Cameron a d’abord sélectionné avec l’équipe de monteurs les meilleures performances pour chaque scène. Puis il a utilisé une caméra virtuelle révolutionnaire pour créer des plans spécifiques. Cette caméra a permis au réalisateur de tourner des séquences dans un monde généré par ordinateur, comme s’il tournait dans un lieu réel ou sur un plateau. A travers elle, il ne voyait pas Zoe Saldaña ou Sam Worthington mais leurs personnages bleus géants évoluant dans le monde de Pandora. “Je pouvais voir chacun à l’endroit précis où il était censé se trouver, au-dessus ou au-dessous de l’eau,” reprend le cinéaste. “Je pouvais leur parler par le biais du système de sonorisation des plongeurs. Ils jouaient en fonction des directives en temps réel basées sur ce que je voyais sur la caméra virtuelle.”
Les effets visuels de Wētā FX
Les prises de vue de la caméra virtuelle ont d’abors été montées en séquences. Puis, les plans et les performances captures ont été livrés aux experts en effets visuels de Wētā FX. Sous la direction du superviseur principal des effets visuels Joe Letteri, ils ont veillé à préserver toutes les nuances apportées à chaque performance des acteurs. Ils ont aussi ajouté les mouvements subtils des queues et des oreilles des Na’vi.
“Nous avons regardé chacune de leurs performances image par image pour nous assurer de leur correspondance,” commente Joe Letteri. “Il faut toujours en revenir aux personnages et à la capacité d’être avec eux, dans le moment présent, de voir leurs façons de jouer, de comprendre ce qu’ils ressentent et ce qu’ils traversent. C’est cette connexion émotionnelle que nous recherchons toujours.” “Ce qui nous intéresse dans la performance capture, c’est la performance dans sa globalité physique, émotionnelle, le visage, le regard, tout,” renchérit James Cameron. “Ce que l’acteur livre sur le moment est sacré.”
Pour Avatar : La voie de l’eau, la performance capture faciale développée pour Avatar a été encore améliorée. Elle nécessite désormais deux caméras haute définition – au lieu d’une seule – conçues pour capter une interprétation encore plus fidèle et plus nuancée.
Comprendre l’eau
Plus de cinq ans de recherche et de développement ont été nécessaires pour inventer de nouveaux logiciels et de nouveaux procédés pour Avatar : La voie de l’eau.
Travaillant de concert avec l’équipe de Lightstorm, Wētā FX a créé des personnages photoréalistes captivants et émouvants et établi numériquement, et à un niveau sans précédent, le monde de Pandora. Le studio a imaginé et intégré dans les ordinateurs chaque plante, chaque arbre, chaque rocher… Des percées significatives dans l’éclairage, l’ombrage et le rendu ont permis de réaliser des plans que l’omniprésence de l’eau rendait plus complexe.
“Une grande partie du film se déroule dans et sous l’eau,” raconte James Cameron. “Nous avons dû comprendre comment l’onde bouge quand une énorme créature déplace des tonnes d’eau avec sa nageoire. Ou quand la plus petite goutte d’eau atterrit sur le front de quelqu’un, ruisselle sur son sourcil et descend le long de son visage. C’est un problème incroyablement complexe mais nous ne sommes pas partis de zéro. Nous avions créé des simulations d’eau sur Titanic. Là, il nous fallait franchir un palier cinq fois supérieur ! La beauté de la chose, c’est que la résolution du problème de l’eau pour ce film permettra de la filmer jusqu’à la fin des temps. Ces outils sont d’une importance capitale pour l’industrie des effets spéciaux en général.”
Crédit photos : © 20th Century Studios
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