Il est celui à qui Marvel a confié la réunion de six de ses plus puissants super-héros. Fan des Avengers, il sait de quoi il parle et espère bien le prouver avec ce film.

JOSS WHEDON (EXECUTIVE PRODUCER)

Vous êtes connu dans la communauté geek, celle de la télé et celle des comics mais vous êtes presque un inconnu pour celle du cinéma si ce n’est pour quelques scénarios et votre long métrage Serenity. Comment avez-vous convaincu Marvel Studios de vous confier ce projet ?

Joss Whedon : Marvel a tendance à engager des gens que personne d’autre n’engagerait. Et je connaissais Kevin (Feige, le président de Marvel Studios, NDLR) depuis un moment. Mais je crois que la raison principale est que j’avais une histoire à raconter et qu’ils avaient envie d’en connaître la fin.

Comment s’est passé votre collaboration avec Marvel Studios ? Vous deviez chacun avoir des idées bien précises sur ce que vous vouliez, que ce soit concernant l’histoire ou le développement des personnages. Comment vous en êtes-vous sorti ?

Les contraintes et demandes de Marvel concernaient plus la structure du film que les personnages et elles n’ont pas été compliquées à intégrer. Je ne crois pas leur avoir présenté quoi que ce soit qui ne donnait pas l’impression d’être juste pour les personnages, des personnages que j’ai lus, regardés et aimés pendant des années.

Vous n’avez pas pu choisir vos personnages principaux ni vos acteurs principaux. Avez-vous ressenti un manque de liberté ou au contraire apprécié d’avoir une première base pour commencer à écrire le scénario ?

J’aime avoir des paramètres tant que j’ai aussi de la place pour créer à l’intérieur de ces paramètres.

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Vous avez la possibilité de prendre un nouveau départ avec Hulk pour Avengers. C’est aussi la troisième tentative d’adaptation du personnage au cinéma. Qu’est-ce qui vous fait penser que c’est la bonne ?

Nous avons vraiment intégrer l’acteur et le monstre dans un même personnage. Et je crois que Mark Ruffalo est un des meilleurs acteurs encore vivants, c’est un plus.

Comment avez-vous développé le personnage de Nick Fury ? Est-ce qu’ici il parle moins mais agit plus ?

Nick Fury est vraiment au cœur des Avengers. En soi, il est plus un manipulateur qu’un héros mais il a quand même quelques bonnes scènes d’action.

Comment avez-vous développé le personnage de Haweye car dans Thor il n’avait qu’une minuscule scène ?

Hawkeye est le genre de type qui fait peur. Il aime être en hauteur et loin des autres, c’est un sniper, en fait. Mais il a un lien très fort avec Black Widow ce qui apporte une certaine chaleur au film.

Et Black Widow, sachant que vous êtes un féministe convaincu ?

Black Widow est plus sombre dans ce film qu’elle ne l’était dans Iron Man 2. Je fais un peu allusion à son passé et ce n’est pas très joli.

Qu’est-ce qui fait de Loki un bon super-méchant pour Avengers ?

Les Avengers sont puissants mais Loki n’a pas son pareil pour les atteindre au plus profond d’eux-mêmes. Il peut dominer la plupart d’entre eux mais il s’amuse encore plus à les titiller.

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Vous avez toujours été très critique envers les films de super-héros des autres réalisateurs. Qu’est-ce qui vous faire penser que le vôtre est différent ou meilleur ?

Je ne peux pas dire qu’il est meilleur. Tout ce que je peux dire, c’est que c’est le mien.

Le film sort en 3D mais vous ne l’avez pas tourné en 3D.

Dieu merci ! Tourner en 3D est un cauchemar mais je gardais constamment à l’esprit que je tournais le film pour qu’il soit ensuite converti en 3D ce qui n’a pas beaucoup changé ma façon de filmer esthétiquement parlant car j’aime les plans larges et j’aime avoir une vraie sensation de l’espace qui nous entoure.

Vous avez pu obtenir un style qui vous est propre en faisant cohabiter autant d’univers différents (Captain America est très terre à terre, Iron Man est versé dans tout ce qui est technologique et Thor est un Dieu) et succédant à des films avec chacun déjà un style bien défini ?

C’est vrai que le plus dur a été de réunir tous ces super-héros sous un même toit (sourire). Je ne voulais pas copier les styles des films Marvel précédents parce qu’ils ont chacun leurs particularités. Mais j’aime jouer avec la caméra, j’aime l’utiliser de façon à ce qu’elle soit comme un membre de l’équipe, je ne veux pas seulement l’utiliser pour montrer ce qui se passe. J’espère créer une énergie cinétique qui rappellera l’énergie des comics mais, en même temps, je n’aime pas que les spectateurs aient conscience de la caméra. Le style se construit au fur et à mesure du film et gagne peu à peu sa légitimité. Ce n’est pas comme si j’avais voulu dès le début faire un grand film d’art et d’essai.

Ressentez-vous la pression des fans ?

Etant un fan moi-même, je sais que les attentes des fans peuvent être mortelles (sourire). Il y a deux choses que les fans détestent : qu’on les ignore et qu’on les traite avec complaisance. Et ils le sentent tout de suite quand c’est le cas. Je pense qu’ils vont trouver dans Avengers tout ce qu’ils ont toujours espéré voir pour chacun de ces personnages mais sans sentir que l’on a mis telle ou telle chose juste pour leur faire plaisir. Mais j’ai aussi fait ce film pour ceux qui n’ont jamais entendu parler des Avengers et qui vont aller le voir parce qu’ils n’ont rien d’autre à faire un samedi après-midi ou parce qu’ils ont aimé la bande annonce ou parce qu’ils aiment un des acteurs.

Comment avez-vous gérer le vol du scénario de Samuel L. Jackson et la divulgation de son contenu ?

J’ai réécrit et la nouvelle version s’en est trouvé que meilleure ! Mais je ne peux pas m’inquiéter des problèmes de sécurité, je dois penser à la scène suivante.

Qu’est-ce qui était le plus intimidant : les grosses scènes d’action ou diriger les acteurs ?

Diriger les acteurs est une joie. Diriger les scènes d’actions est une corvée. Quoique, parfois, on a de belles explosions.

Les acteurs disent souvent qu’ils apprennent sur eux-mêmes avec chaque rôle. Vous avez appris quelque chose sur vous en écrivant et réalisant Avengers ?

Je suis aussi venimeux qu’un serpent.

 Article paru dans Studio Ciné Live – Hors-Série Superhéros – 2011