Le garçon souffre d’un dédoublement de la personnalité. Brendan Fraser peut être étrangement calme et réservé puis partir soudainement en une vrille bondissante avec des yeux pétillants et un rire tonitruant accompagné d’un sourire plein de dents prêtes à vous bouffer. Ce qui reflète finalement sa carrière : des comédies, puis une série de films sérieux et tout à coup deux films plutôt fun : Voyage au centre de la terre 3D et La Momie 3 : la tombe de l’empereur dragon.

Depuis Collision, vous avez enchaîné les drames et thrillers à petit budget et là, coup sur coup, deux gros films d’aventures avec plein de comédie dedans. Cela vous manquait-il de ne plus faire rire ?

Brendan Fraser : C’est surtout jouer Rick O’Connell dans une Momie qui me manquait. Cela fait sept ans. Quand j’ai appris qu’un autre était en projet, j’étais déjà prêt à signer. Voyage au centre de la terre a été tourné il y a deux ans parce que ce film est très technique. Il est aussi intéressant pour l’industrie du film parce qu’il est en 3D. Que les spectateurs aiment ou n’aiment pas l’histoire, nous verrons, mais vous ne pouvez pas ignorer le fait que ce film est le premier d’un genre qui va se développer dans les années à venir. Tout est nouveau, nous ne savons même pas si ce film va fonctionner techniquement en dépit du fait que nous avons essayé de tout bien faire. Et si ce n’est pas le cas, quelqu’un d’autre améliorera cette technique. Mais la 3D reste la star de ce film. Aujourd’hui, vous pouvez voir des films de différentes façons : à la télé, sur votre ordinateur, sur votre nanoPod, sur votre téléphone… Mais pas un film en 3D. Ce film nous fait retourner dans les salles et vivre une expérience collective. Et c’est le côté le plus sympa de ce film.

Dans Voyage au centre de la Terre

Vous avez toujours su vous garder d’être catégorisé dans un genre ou dans un autre. Comment parvenez-vous encore à le faire ? Il y a de moins en moins de bons scénarios et donc de moins en moins de choix pour vous.

J’espère avoir toujours la possibilité d’améliorer un scénario que je ne trouve pas assez bon. Et je cherche à travailler avec des réalisateurs confirmés. J’envisage de moins en moins travailler sur des premiers films … J’ai souvent plus d’expérience que le réalisateur ou le scénariste et c’est loin d’être satisfaisant. Et ces films n’ont pas toujours du succès… Cela ne veut pas dire que je ne gagne rien de ces expériences, au contraire, à chaque fois j’apprends quelque chose, que ce soit une bonne ou une mauvaise leçon, ou je rencontre quelqu’un d’intéressant ou je visite un nouveau pays… Mais c’est vrai que j’ai la chance d’avoir des rôles très divers et c’est important parce que c’est un défi constant pour moi. Je n’ai pas le sentiment de me répéter. Quand j’aurai ce sentiment, il sera temps pour moi de faire autre chose.

Beaucoup d’acteurs passent à la réalisation…

Pas moi. Ce n’est pas parce que vous êtes un acteur, que vous avez du succès et que vous avez la possibilité de réaliser que vous devez le faire. Il y a des exceptions bien sûr, des acteurs qui ont travaillé sur de nombreux films et qui passent progressivement à la réalisation, comme le regretté Sydney Pollack. C’était un homme merveilleux. Il a produit Un Américain bien tranquille. Personnellement, j’ai vraiment le sentiment d‘avoir perdu quelqu’un… (Il porte la main à son cœur, véritablement ému, et un ange passe). Est-ce que je veux réaliser ? Non. Je suis bien comme acteur.

Dans La Momie 3 : la tombe de l’empereur dragon

Estimez-vous prendre plus de risque quand vous choisissez un rôle dramatique comme dans Collision comparé à un Rick O’Connell que vous connaissez ? Une Momie 3 semble plus confortable…

Loin de là ! J’étais en Chine ! En pleine tempête ! Et j’en prends plein la tronche pendant tout le film ! (Rires) Jouer, c’est prendre un risque, quel que soit le rôle ou le film. Si vous prenez ce risque, vous apprenez plus, vous apportez plus. Et si vous avez un bon réalisateur… Sur Gods and Monsters, Ian McKellen disait qu’un bon réalisateur est celui qui vous dit : « C’est par là », parce qu’il vous dirige. Il vous dit où aller mais il vous laisse faire votre travail. Quant à la Momie, j’en ai fait un autre parce que jouer Rick O’Connell est vraiment fun et parce que j’en avais marre que tout le monde me demandent quand il y en aurait un autre ! (Rires)

Vous aurez 40 ans en décembre. Passer dans une autre dizaine ne vous effraie-t-il pas ?

Si ! J’ai mal aux genoux, je perds mes cheveux… (Rires) Non, j’attends de voir cela avec impatience en fait. Entrer dans la quarantaine veut aussi dire que je me dirige vers la cinquantaine et un de mes amis qui vient d’avoir 50 ans m’a dit : « C’est la meilleure chose qui me soit arrivé dans la vie. » Je lui ai demandé pourquoi et il a répondu : « Parce que je suis arrivé jusque-là ! Je suis toujours en vie ! J’ai plein de copains de l’autre côté ! » Ce n’est pas dénué de sens selon moi. (Rires)

Article paru dans Ciné Live – N°125 – Eté 2008

Crédit photos : © New Line Cinema / Universal