Il est Joshua Nolan, ancien Boucher de Yosemite devenu justicier et héros. Dans cette saison 3 de Defiance, Grant Bowler a découvert que se battre dans de la vraie neige était beau mais épuisant. Mais beau.

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Que pouvez-vous nous dire de Joshua Nolan dans cette saison 3 et de sa relation avec sa fille adoptive, Irisa ?

Grant Bowler : J’ai détesté les voir déconnectés dans la saison 2. Je l’ai ressenti personnellement parce que j’aime travailler avec Stephanie [Leonidas] et parce que cette relation est la pierre angulaire de cette saison. J’ai une fille de 12 ans et jouer cette relation père/fille est centrale pour moi. La saison 2 a été difficile pour nous deux car elle n’est que conflit et séparation. C’était comme être en manque, c’était douloureux. Cette saison 3 est une saison de rêve. Tout devient clair et notre relation devient bilatérale. Dans les saisons 1 et 2, cette relation était surtout centrée sur Nolan. Dans la première, il jouait au père et élevait Irisa et dans la deuxième, il affrontait une adolescente en colère. Dans cette saison 3, notre relation est plus équilibrée et plus mûre. Quant à Nolan le justicier, il est toujours le même, qu’il porte ou non son badge. Les gens sont peut-être plus à l’aise quand il le porte. Mais nous nous sommes éloignés de ce côté strict de devoir porter le badge comme dans les westerns. La ligne entre les bons et les méchants devient floue cette saison. Nolan est pragmatique et il fera tout ce qu’il faut pour que le travail soit fait. Il est aussi plus en conflit avec lui-même. J’ai toujours dit dans les saisons précédentes que je voulais le voir sous pression. Jusqu’à présent, les conflits émanaient des autres. Cette fois-ci, le conflit est intérieur. Nolan est un vrai chevalier blanc mais il lui est plus facile de jouer ce rôle face aux autres que face à lui-même.

Defiance_gallery_302Recap_10_0En quoi Nolan est-il un personnage intéressant pour vous ?

Ce que je trouve le plus captivant à son sujet est sa détermination absolue à décider de son sort. Il est un mélange de pragmatisme et d’idéalisme. Ce que j’aime, c’est qu’il se jette dans l’action. Cette saison, il va prendre la pire des décisions. L’idée est bonne mais les conséquences sont désastreuses. Cela m’ennuie à la télé de voir les personnages dire exactement ce qu’il faut quand il faut. Ils ont une arme pointée sur leur tempe et pourtant ils vont répondre calmement et raisonner avec leur agresseur. Presque tout le monde hurlerait et s’enfuirait à ce stade de la situation. J’aime la franchise de Nolan. Il existe un personnage de roman que j’adore qui s’appelle Pike [Joe Pike, un héros des romans de Robert Crais]. Il a de gros tatouages rouges représentant des flèches sur ses bras. Elles symbolisent le fait qu’il va toujours de l’avant. C’est le cas de Joshua Nolan. Peu importe ce qu’il se passe, il aura toujours la foi, ira de l’avant et les choses s’arrangeront.

Comment définiriez-vous l’action de cette saison 3 ?

Il semble qu’à la fin de chaque saison, je suis cliniquement mort et pourtant, je ne vois pas pourquoi tout le monde veut me tuer. (Rires) Cette fois, j’entraîne Irisa avec moi et nous sommes tous deux congelés dans une capsule de survie. La saison 3 commence sept mois plus tard. La Coalition militaire de la Terre s’est retirée de Defiance. Il n’y a plus de pouvoir établi. La majorité des gens ont soigné leurs blessures et sont passés à autre chose, contrairement à Nolan et Irisa. Pour nous, tout cela est arrivé il y a cinq minutes. Voir comment ces deux perspectives différentes vont évoluer va être intéressant. Et puis, pour cette saison 3, nous avons tourné au cœur de l’hiver. C’était horrible. Au quotidien, c’était éprouvant physiquement. Nous avons connu le mois de février le plus froid. Il faisait régulièrement -25° Celsius. Le vent soufflait si fort qu’il faisait remonter la neige le long des collines. Et là vous perdez tout espoir. Dès la première prise, vous savez que si vous sortez de Defiance, vous mourrez. C’est génial. Quand vous voyez les personnages dans les plaines, vous n’avez qu’une envie, c’est de vous blottir sous les couvertures. Vous craignez vraiment pour leur sécurité. C’est un des éléments stupéfiants de cette saison. Il renforce le côté post-apocalyptique du paysage que nous utilisons depuis le début sauf que cette fois, il n’est pas en images de synthèse. La neige est bien réelle. Je suis Australien et j’ai découvert tellement de choses ici, à Toronto. Par exemple, un des chauffeurs m’a dit un jour : « Ne vous inquiétez pas, il fait trop froid pour neiger. ». Et j’ai aussi découvert la pluie verglaçante. Mais comme je le dis, cette neige a ajouté de la valeur à l’image. Vous ne pouvez pas faire semblant dans un tel environnement. Dans un sens, cela nous a aussi rapprochés même si pendant un mois je ne pouvais savoir qui était qui. Tout le monde ressemblait à la même grosse boule matelassée avec deux yeux. L’artiste en moi meurt d’envie de tourner à nouveau dans ces conditions mais l’être humain en moi ne veut plus jamais connaître ça. (Rires)

Defiance_gallery_302Recap_12Comment vous en sortez-vous cette saison dans les scènes d’action ?

J’ai plutôt bien récupéré vers la fin de la saison 2 et je pensais alors que je pouvais tout faire. Cette saison 3 a de nouveau beaucoup de scènes d’action. Bien qu’intelligemment écrite, j’ai fini la saison 2 sans avoir réellement une vue d’ensemble. Ce n’est pas le cas de la saison 3. Nous avons retrouvé notre raison d’être. La série est plus simple et nous sommes revenus à cette idée de nous contre eux, de nous contre cette menace extérieure. Aucun de nos problèmes n’est domestique, ils sont tous mortels et bien présents. Pour Nolan, cela signifie plus d’échanges de coups de feu et beaucoup de bagarres. En une semaine, je me suis battu cinq fois. Une fois dans 1,20 m de neige. Ma veste pesait 60 kg. Vous imaginez vous battre à coups de poing et tomber constamment dans 1,20 m de neige ? A la fin de la semaine, j’étais épuisé. Et je suis revenu au point où je crains de nouveau de passer la sécurité aux aéroports. Quand il y a des échanges de coups de feu, je suis couvert de cordite. Dès que je dois prendre l’avion aux Etats-Unis, je deviens parano. Si jamais ils me testent [pour trouver des traces d’explosifs], il n’y aucun doute qu’ils me trouveront positif. Et je n’ai pas envie de m’expliquer en jouant la carte de l’acteur parce que si j’étais un agent de la sécurité, c’est à ce moment-là que je sortirais mes gants de caoutchouc et dirais : « Acteur, donc ? C’est sympa. Et vous gagnez tout cet argent à ne rien faire ? Penchez-vous, s’il vous plaît, monsieur. » (Rires)

Pensez-vous que la série puisse survivre à la mort de Nolan ? Etes-vous inquiet de mourir à la fin d’une saison ?

Pas du tout. J’ai été tué plus de fois que vous n’avez eu de repas chauds. (Rires) Je ne vois pas mon personnage comme un personnage central mais je vois les relations entre les personnages comme un personnage central. Je pense que le public s’attache plus à une relation qu’à des personnages. Vous perdez une relation importante et vous perdez votre série. Je pense souvent qu’il existe des dynamiques qui constituent le cœur d’une série. La science-fiction peut être très intelligente mais au final, si le public ne se sent pas concerné, cela ne sert à rien. Ce qui était beau à propos de Rutger Hauer dans Blade Runner est qu’il était comme un enfant. Il vous touchait alors qu’il était monstrueux. C’est de la bonne science-fiction quand vous êtes ému par le méchant, par le psychopathe. Je travaille pour le public et pour personne d’autre. Si je ne suis pas au service du public, autant ne pas être ici. Le public est mon principal intérêt. Si je le dessers ou si je porte préjudice à la série, autant être viré. Parfois, les personnages ont une date d’expiration. Est-ce que je la vois venir pour moi ? Bien sûr, tout peut arriver. Est-ce que j’en ai envie ? Bien sûr que non, j’adore travailler sur cette série.

Quelle fin voudriez-vous voir pour la série ?

Une fin rapide, pas de fondu au noir. Mais avant cela, je voudrais faire un épisode en direct ou shakespearien ou chanté. Je voudrais nous voir disparaître alors que nous sommes au plus haut. Je pense qu’il arrive toujours un moment où chacun sait d’un point de vue créatif qu’il est arrivé au meilleur de lui-même. C’est toujours triste de partir pendant une phase descendante.

Defiance_1sh_S3_JOSHUA_SingleEst-ce qu’être seulement acteur vous suffit ?

Tout le monde sur cette série peut vous dire que je ne me contente pas d’une seule casquette. Nous sommes des conteurs d’histoires et à ce stade de la saison 3, je connais mon personnage mieux que tous les réalisateurs pour l’avoir incarné tous les jours pendant trois ans. Vous finissez par collaborer avec les auteurs qui en retour adaptent leur écriture pour vous. Et vous avez une conversation à plusieurs. Je crois personnellement que le meilleur travail vient toujours de la troisième idée. C’est celle-là qui me fait me lever le matin. Qui que vous soyez, un acteur, un réalisateur ou un photographe, tout est dans la collaboration. Personne n’a la science infuse. Aussi, est-ce que j’aimerais plus apporter ma contribution dans cette façon de raconter les histoires ? Oui, quand je serai plus vieux.

Que pouvez-vous nous dire sur les Omecs ?

Ils sont plus puissants que toutes les races votanes. Ils étaient aussi là avant elles. Ils étaient leurs maîtres. Quand les Omecs arrivent sur Terre, ils sont donc extrêmement impopulaires auprès de tout le monde sauf des humains car ces derniers n’ont aucune idée de qui ils sont.

Pourquoi pensez-vous que la science-fiction est devenue si populaire ces derniers temps ?

Je pense que ce genre est devenu incroyablement populaire ces huit dernières années. C’est juste mon opinion mais je pense que quand le monde est en paix, nous avons tendance à faire notre introspection et à raconter des histoires plus intimes. Moins nous sommes à l’aise dans notre société, plus nous cherchons à raconter des histoires les plus éloignées possible de notre vie quotidienne. Le monde a connu beaucoup de conflits et vécu dans la crainte pendant plus d’une décennie et c’est pourquoi nous avons autant d’extraterrestres, de vampires et de loups garous. Quand nous rentrons chez nous et allumons la télé, nous voulons toujours être divertis mais pas au point d’être terrifiés dans notre propre salon. Nous allons connaître une nouvelle époque comme celle des années 50 où nous aurons le sentiment d’une sécurité factice et l’introspection commencera.

Table ronde réalisée sur le tournage de Defiance, à Toronto – 21 avril 2015

Crédit photo : Defiance Saison 3_©_2014_Open_4_Business_Productions_LLC