Dans Game of thrones, il est Davos, Main du roi Stannis, elle est Mélisandre, prêtresse du roi Stannis. Ils ont un même but mais des méthodes radicalement opposées. Ce qui amuse et passionne les deux acteurs.

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Vous jouiez déjà tous les deux dans le film Ingrid Jonker (2011). Comment se sont passées vos retrouvailles sur Game of thrones ?

Carice Van Houten : Nous étions amoureux dans le film mais dans la série, nous nous détestons.

Liam Cunningham : Comme dans un mariage ! (Rires)

CVH : Grâce à ce passé, il nous a été plus facile de retravailler ensemble. Liam est la personne la plus facile avec qui j’ai travaillée.

LC : Que veux-tu dire exactement ? (Sourire) Je ne suis pas sûr…

CVH : (Elle lui pose la main sur le bras) Je te fais un compliment. Mais entre Ingrid Jonker et Le Trône de fer, l’histoire et les émotions sont entièrement différentes.

LC : Entièrement. (Rires)

Vu l’accumulation des morts surprises dans cette série, quand commence une nouvelle saison, demandez-vous aux scénaristes si vous allez survivre ?

CVH : C’est en effet la première question que l’on pose quand on revient ! (Rires) Pour faire ou non des projets pour les vacances suivantes. (Rires) Mais c’est si excitant car même nous, nous ne connaissons pas notre avenir. On s’estime chanceux quand on découvre que l’on est dans l’épisode suivant. Cette série est comme un soap opera.

LC : Un soap opera de haute qualité.

CVH : On est tous les deux des fans et on oublie presque qu’on joue dedans quand on la regarde. Et puis, tout à coup, on apparaît à l’écran.

LC : Et on a alors l’impression de gâcher la série. (Rires)

C’est quand même une série où ce sont les méchants qui gagnent.

LC : Je suis entièrement d’accord avec vous. La fin de l’épisode 109 a été un tournant dans le monde de la télé, surtout aux Etats-Unis où le personnage principal gagne toujours. Ce qui arrive à Ned Stark… Les spectateurs ont tous crié : « Noooon ! ». L’épisode s’arrête avec l’épée qui s’abat sur le cou de Stark et là on se dit : « Mais comment va-t-il s’en sortir ? » Et dans l’épisode suivant, vous découvrez sa tête sur une p… de pique ! Et là, vous vous dites, OK. Ca change la donne.

CVH : Malheureusement, c’est la réalité actuelle. Les méchants gagnent. La plupart du temps.

LC : Tu trouves ?

CVH : Oui.

LC : Mais nous ? On est les méchants ou les gentils ? (Rires) C’est ce que je trouve intelligent dans cette série, le fait que les gentils ne sont pas si gentils que ça et les méchants pas si méchants que ça. Votre sympathie et votre empathie pour les uns et les autres changent au cours de l’histoire, ce qui est incroyablement intéressant pour la série et incroyablement difficile à écrire car ce doit être subtil. Quand je regarde la série, en tant que spectateur, mes sympathies évoluent. Je prends du recul et je peux comprendre l’action de tel ou tel personnage. Je comprends les motivations de Mélisandre, par exemple. Je n’aime pas ses méthodes mais nous voulons tous les deux la même chose. Mais j’attends quand même que Davos massacre des enfants ! (Il éclate de rire) Dans une crèche ! Et avec une hache ! Je n’en ai pas encore parlé aux producteurs mais il y a trop de gens qui m’aiment. (Rires)

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Carice, vous avez quelques scènes de nu dans la série. Comment les abordez-vous ?

CVH : Nerveusement. Etant hollandaise, je suis habituée à la nudité au cinéma et à la télé. Ce qui ne veut pas dire que j’aime ça mais je suis plus à l’aise que d’autres. Je joue sur l’humour parce que je n’aime pas la tension que la nudité crée sur un plateau. Plus vous cherchez à vous cacher et plus les gens veulent voir. Je montre donc le « matériel », que les gens passent à autre chose. Mais ce n’est pas ce que je préfère au monde. Je suis stressée à chaque fois, je regrette de ne pas être allée à la gym la veille, je suis une femme, je prends de l’âge…

LC : C’est une avalanche d’émotions.

Il faudrait plus d’hommes nus dans cette série !

CVH : Oui !

LC : Pourquoi voulez-vous voir un homme nu ? Où serait l’avantage dans tout ça ?

CVH : Sachant que dans cette série la nudité n’est jamais gratuite. Elle fait partie de la vie. Je n’ai jamais compris pourquoi on pouvait montrer des mitrailleuses mais pas un p… de téton ! Pardon. Qui dort en gardant son soutien-gorge ? C’est peut-être une approche hollandaise mais je pense qu’on doit s’habituer à tout ça. Ca fait partie de la vie.

LC : Les gens disent que la série est sexiste et violente et blablabla. Ce serait le cas si les femmes étaient diminuées, s’il n’y avait pas de personnages féminins forts comme Mélisandre. Les femmes sont parmi les personnages les plus dangereux de cette série. Regardez Cersei ! Elles sont extraordinairement bien dessinées. Cette série n’est pas condescendante. Elle le serait au contraire si elle cachait le sexe et la violence. Elle montre le côté sombre et le côté lumineux de l’humanité et la femme n’y est pas un otage ni là juste pour faire joli. Elle représente un vrai p… de danger ! Et il faut la surveiller. Comme dans la vraie vie ! (Rires)

CVH : Les personnages féminins sont si forts. Ce ne sont pas que des femmes de rois, assises dans des châteaux, allaitant leurs bébés. C’est ce qui m’a attiré dans cette série. Mélisandre est un personnage formidable, toujours en évolution, en développement. C’est un mystère. Mais aucun personnage n’est tout blanc ou tout noir. Ni ennuyeux. Ni lié à des intrigues ennuyeuses.

LC : Mélisandre est très énigmatique.

CVH : Et les scènes contiennent parfois des moments extrêmes et j’adore ça. Les scènes sont étoffées, bien écrites, consistantes.

LC : Et longues. C’est génial pour un acteur.

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Liam, ne voyez-vous pas dans Davos un peu de Tom Hagen, le personnage joué par Robert Duvall dans Le Parrain ?

LC : Tout à fait ! Je me réfère toujours à ce consiglieri. Quand on me demande pourquoi Davos est si loyal à Stannis, je pense à Duvall. Il n’est ni stupide ni aveugle, il est guidé par ses principes, sa morale. Il ne remet pas en cause ce qu’il fait car il sait que c’est la bonne chose à faire. Mais beaucoup me demandent : « Pourquoi tu ne plantes juste pas ce type ? ». (Rires)

CVH : Je déteste dire ça, mais Davos est un vrai gentil.

LC : Vous voyez ! C’est pour ça que je veux tuer tous ces gosses ! (Rires) Je ne veux pas qu’on me trouve gentil. J’emm… les gentils ! Mais vous devez avoir des personnages qui s’en sortent. Il y a quelques personnages que vous n’imaginez pas voir mourir. Et pourtant. Mais vous n’y pouvez rien. Les producteurs de cette série devraient avoir de longues barbes blanches parce qu’ils se comportent vraiment comme des dieux. Ils ont un pouvoir effrayant. (Rires)

Carice, voyez-vous Mélisandre comme une prêtresse maléfique ?

CVH : Je ne crois pas au concept du mal. Je ne pense pas que les gens naissent maléfiques. C’est vrai que les méthodes de Mélisandre ne sont pas très amicales. (Rires)

LC : Tu parles comme une vraie diplomate. (Rires)

CVH : Pour jouer un personnage comme elle, vous devez justifier ce que vous faites et dans son esprit, ce qu’elle fait est bien. Les sacrifices sont durs mais ils sont nécessaires. Il y a des événements qui s’annoncent et qui sont plus importants. Dans la saison 4, Mélisandre n’est pas que la prêtresse prêchant sa foi et ses croyances. On la voit plus souvent dans des moments plus… casaniers ?

LC : On en apprend plus sur son passé.

CVH : On va aussi voir le triangle constitué par elle, Stannis et la femme de Stannis. Et on va bouger et entrer en collision avec un autre monde que nous connaissons déjà… Tout cela promet d’être intéressant.

Article paru dans Studio Ciné Live – Hors-Série Game of thrones – 2014