Quand d’étranges phénomènes se produisent lors de l’autopsie d’une belle inconnue. Le réalisateur André Øvredal dissèque deux scènes de son film d’horreur. The Jane Doe Identity sort en salles ce 31 mai.

Scène 1 :

Brian Cox et Emile Hirsch

André Øvredal : Nous avons construit une morgue datant des années 60-70. Je voulais un lieu ancien, bien entretenu mais qui n’a jamais été rénové ni modernisé. Ses couleurs apportent un beau contraste avec le ton si blanc de la peau de Jane Doe. Il y a aussi des couleurs chaudes pour accompagner la présence des deux médecins légistes, un père et son fils, et montrer que c’est aussi leur maison car ils habitent au-dessus. La composition du cadre a son importance. Je montre le plafond pour faire sentir la pression du fait qu’ils sont dans un sous-sol. Je montre le moins possible le corps de Jane Doe bien qu’il soit perpétuellement exposé. Tout est aligné dans ce décor : les formes carrées sur les murs, le triangle que créent les deux hommes avec Jane Doe en son sommet et qui se trouve au centre du cadre. Ce plan fait naître du mystère car vous ne voyez pas la personne morte mais vous voyez la curiosité des deux hommes qui ne comprennent pas ce qui se passe. Ce plan simple capture en fait l’essence même du film. Après Troll Hunter, je voulais retourner à une réalisation classique – je n’ai jamais pensé tourner Jane Doe caméra à l’épaule, par exemple – et créer une atmosphère dans un environnement très contrôlé. Seven m’a aussi inspiré. David Fincher filme de façon si classique, si belle et si simple. Il crée tant de tension juste en faisant confiance au cadre, aux acteurs et à l’action. Il montre juste les choses.

Scène 2 :

Olwen Kelly

André Øvredal : Jane Doe est le personnage principal du film. Elle est tour à tour mystérieuse, vulnérable, puissante. Parfois, je la filme comme un figurant dans l’arrière-plan mais elle est toujours là et elle participe à sa façon à la conversation. Comme elle ne bouge pas, le défi était de développer son personnage en utilisant uniquement la caméra et la lumière. Quand elle a la tête renversée avec la bouche ouverte, je la fait apparaître vulnérable. En revanche, plus tard dans le film, quand sa tête est plus redressée – une position nécessaire dans le processus de l’autopsie – je la fait apparaître plus puissante. Le fait que ce soit une actrice qui interprète Jane Doe aide beaucoup, grâce notamment à ses subtiles expressions faciales. Le public peut sentir que c’est un vrai être humain allongé sur cette table et non un mannequin. Sinon, le film n’aurait pas fonctionné. J’ai été très prudent quant à sa nudité. Je ne voulais pas montrer son corps d’une façon sexuelle ou qui donnerait l’impression d’un viol. Je la représente comme avec désinvolture mais de belle manière. De la même façon, le gore n’est pas gratuit dans mon film. Par exemple, j’utilise l’autopsie du grand brûlé qui ouvre le film pour désensibiliser le public car quand arrive l’autopsie de Jane Doe, j’ai besoin qu’il se concentre sur l’histoire et non sur le choc de découvrir ce qu’est une autopsie. Sinon, je le perds.

Article paru dans Studio Ciné Live – N°90 – Mai 2017

Crédit photos : © 42 / Wild Bunch